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Edito du 15 septembre 2025 : La démission de Wadagni

Romuald Wadagni doit-il démissionner ? Pour le parti Les Démocrates, c’est une exigence morale. Et je pose une autre question alors : au moment où Lionel Zinsou était premier ministre de Boni Yayi et candidat, a-t-il démissionné en 2015 ou 2016 ? Evidemment non. Ce qui n’était pas valable il y a à peine 10 ans n’est pas valable non plus aujourd’hui.

Oui, me dira-t-on, en 2016, il n’y avait pas le quitus fiscal. Et effectivement, ce quitus fiscal est délivré par une direction qui dépend du ministère des finances. La possibilité de manigance est élevée, surtout au regard de ce qui s’est vu lors des élections législatives de 2023. On peut bien ourdir des entourloupes pour empêcher tel ou tel candidat aux élections présidentielles ou législatives de disposer de cette pièce fondamentale. Cela s’est déjà passé. Et en l’espèce, le Code électoral ne contient aucune disposition explicite obligeant l’administration fiscale à délivrer ce quitus. En d’autres termes, le code électoral crée une exigence, mais ne prévoit pas de mécanisme propre pour garantir sa mise en œuvre. En pratique, le quitus reste tributaire du traitement administratif par les services fiscaux. En cas de contentieux, le candidat mécontent doit se référer au droit commun. Il se retrouverait donc dans le labyrinthe de l’administration fiscale.

Concrètement, rien n’empêche le DG Impôts de faire une manigance si le Chef de l’Etat le lui demande. Que Wadagni soit présent ou pas à son poste actuel, n’est pas un facteur garantissant la délivrance équitable ou non de cette pièce. Ici, c’est la bonne volonté du Chef de l’Etat qui est engagée. Romuald Wadagni, présent au gouvernement ou pas, ne peut rien empêcher, si son chef décide de brider les ambitions d’un candidat. Les voies de recours en ce moment demeurent celles ouvertes par le code général des impôts.   

 Nous ne sommes à l’abri de rien. La loi donne droit à Wadagni de siéger au gouvernement tant que Patrice Talon le voudra. Au regard de notre passé, il a même le droit de rester au gouvernement. Depuis Mathieu Kérékou, on a déjà vu des ministres candidats qui n’ont pas bougé de leurs postes. Et s’il fallait mener jusqu’au bout la logique du parti Les Démocrates, pour renouveler son mandat, même le Chef de l’Etat en fonction a le devoir de démissionner. C’est absurde.

Est-ce même souhaitable que Wadagni démissionne ? Soyons clair : le ministre des finances a le droit de partir. Et il peut le faire si sa stratégie de campagne le lui recommande. Ce que je veux dire, c’est qu’aucune contrainte légale, en dehors du bon-vouloir de Talon, ne l’y oblige. Et que mieux, partir maintenant exposerait le pays à une période d’incertitude sur les marchés financiers. Comme tous les pays de l’UEMOA, le Bénin est présent sur la place financière d’Abidjan. Romuald Wadagni le sait, les incertitudes de ce marché ont des répercussions directes sur les opérations des Etats. Si le ministre des finances s’en va aujourd’hui, il ouvre la porte à la nomination d’un nouveau ministre que le marché prendra du temps pour apprécier. C’est une période de doute qui touche directement les taux auxquels le Bénin emprunte sur le marché. Le risque pays va augmenter d’un cran. Il est inutile d’exposer le pays à de telles pertes que l’on peut éviter en faisant confiance à nos institutions.

Surtout que le parti Les Démocrates demande à Romuald Wadagni de poser un acte inédit que même  Boni Yayi n’a pas été capable d’envisager quand il était au pouvoir.

En réalité, nous entrons dans une période où les suspicions sont nombreuses. Parfois légitimes. C’est à Patrice Talon qu’il appartient de les lever,  en posant les actes nécessaires de dégel qu’attendent les acteurs de l’opposition. Mais, ne nous leurrons pas non plus, s’il se hasarde à jouer le jeu de Boni Yayi, imaginez le bruit que le parti Les Démocrates en ferait.

Olivier ALLOCHEME

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