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Iran: Le programme nucléaire toujours debout malgré les frappes américaines

Les premières évaluations des services de renseignement européens jettent un sérieux doute sur les déclarations américaines concernant la destruction du programme nucléaire iranien. Si des installations ont été lourdement endommagées, le cœur du dispositif, notamment l’uranium enrichi à des niveaux proches de l’arme atomique, serait toujours largement intact.

Les frappes américaines du week-end dernier contre les principaux sites nucléaires iraniens ont été saluées à Washington comme une victoire stratégique. Le président Donald Trump s’est empressé de proclamer sur sa plateforme Truth Social que les installations ciblées, notamment Fordow, avaient été « anéanties ». Pourtant, les premiers éléments recueillis par les services de renseignement européens offrent une lecture bien différente de la situation.

Deux responsables européens ont indiqué que, selon des évaluations préliminaires, le stock critique de 408 kg d’uranium enrichi à 60 % – soit à un pas de l’enrichissement de qualité militaire – n’était pas situé dans le site souterrain de Fordow au moment de l’attaque. Ce stock, au cœur des inquiétudes occidentales, aurait été déplacé vers d’autres sites dans les jours précédant les frappes. Cette précaution prise par Téhéran remet profondément en question l’efficacité réelle des frappes menées par les États-Unis.

Des frappes spectaculaires, mais ciblant des installations partiellement vidées

Le 22 juin, les États-Unis ont lancé des bombes à pénétration massive sur les sites de Fordow et de Natanz, et frappé par missiles de croisière un troisième site à Ispahan, dédié à la conversion du combustible et au stockage. Des images satellites publiées depuis montrent des accès de tunnels bouchés et des traces visibles de l’impact des bombes GBU-57, pesant 13,6 tonnes. Mais selon une source européenne, si les dommages à Fordow sont « étendus », ils ne constituent pas une « destruction structurelle totale ».

Côté iranien, les autorités ont discrètement confirmé que des mesures de protection avaient été prises. Dès le 13 juin, dans une lettre adressée à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi annonçait que l’Iran prendrait des « mesures spéciales pour protéger ses équipements et ses matières nucléaires ». Une décision qui semble avoir permis de sauver l’essentiel du programme nucléaire.

La communauté internationale dans l’attente

Alors que les inspecteurs de l’AIEA ne sont toujours pas autorisés à retourner sur les sites touchés, son directeur général Rafael Grossi a indiqué que le programme nucléaire iranien avait « subi d’énormes dommages », tout en appelant à la prudence : « Parler de destruction totale est exagéré », a-t-il déclaré à la radio française.

La situation soulève également des inquiétudes en Europe. « Nous attendons toujours des informations précises de la part des Américains sur les capacités nucléaires restantes de l’Iran », confie un haut diplomate européen. Les discussions entre les dirigeants européens et Donald Trump, cette semaine, n’ont pas permis de clarifier la position américaine. Une chose est sûre : la politique de l’UE vis-à-vis de l’Iran est actuellement « en suspens », en attendant une éventuelle relance diplomatique de la part de Washington.

Des capacités toujours menaçantes

Certains experts redoutent que l’Iran, bien qu’ayant vu certaines de ses installations endommagées, conserve l’essentiel de ses capacités, en particulier si des centrifugeuses avancées ont été mises en service sur des sites non déclarés. Le fait que le stock hautement enrichi n’ait pas été détruit renforce cette crainte.

Si les frappes ont envoyé un signal fort, elles n’ont pas mis fin à la menace potentielle. Et tant que la diplomatie reste dans le flou, le risque d’escalade persiste. En dépit des effets d’annonce, la réalité est plus nuancée : le programme nucléaire iranien, bien qu’atteint, est loin d’être « anéanti ».

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