Le secrétaire à la Défense Pete Hegseth et le chef d’état-major Dan Caine ont assuré jeudi 26 juin que les frappes américaines sur les installations nucléaires iraniennes avaient été un « succès total ». Une déclaration qui intervient dans un climat de scepticisme croissant, alors qu’un rapport des services de renseignements contredit cette version officielle.

Lors d’une conférence de presse organisée au Pentagone, le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, et le président des chefs d’état-major interarmées, Dan Caine, ont fermement défendu l’opération militaire menée le 22 juin contre les sites nucléaires iraniens. Selon eux, les frappes ont « détruit » les capacités nucléaires de l’Iran, infligeant un coup fatal au programme d’enrichissement de Téhéran.
« Le président Trump a mené l’une des opérations militaires les plus complexes et secrètes de l’histoire, et ce fut un succès retentissant, ayant conduit à la fin de la guerre de douze jours », a affirmé Pete Hegseth. Il a décrit les frappes comme « dévastatrices », insistant sur leur précision et leur efficacité. Des propos qui résonnent avec ceux du président Trump, qui a qualifié l’intervention d’« obliteration » du programme nucléaire iranien.
Une version officielle contestée
Pourtant, un rapport préliminaire du Defense Intelligence Agency (DIA), divulgué quelques jours après les frappes, tempère fortement cette lecture. Il estime que l’opération n’aurait retardé le programme nucléaire iranien que de quelques mois. Une analyse à rebours des déclarations officielles, qui suscite de nombreuses interrogations sur l’ampleur réelle des dommages infligés aux sites visés, notamment Fordow, Natanz et Ispahan.
Le président Trump, dans une communication enflammée sur sa plateforme Truth Social, a dénoncé ce qu’il appelle des « fake news » de la part de médias tels que The New York Times et CNN, allant jusqu’à exiger le licenciement des journalistes à l’origine de ces publications. Il a également exhorté ses partisans à suivre la conférence de presse, la qualifiant de « l’une des plus confirmatoires et professionnelles jamais données ».
Un exposé technique… mais peu de preuves
Pendant la conférence, Dan Caine a présenté un exposé minutieux sur le déroulement de l’attaque. Il a montré des images des installations iraniennes, détaillé l’usage des bombes anti-bunker, et diffusé une vidéo montrant l’un des missiles pénétrant un puits de ventilation de Fordow.
« Tous les projectiles ont atteint leur cible et fonctionné comme prévu », a assuré Caine. Il a souligné que chaque arme avait été « construite, testée, guidée et déclenchée avec précision ».
Mais au-delà de l’exposé technique, peu de preuves tangibles ont été fournies pour appuyer les affirmations selon lesquelles le programme nucléaire iranien aurait été anéanti. Des analystes, dont la correspondante d’Al Jazeera, Patty Culhane, ont dénoncé une « mise en scène narrative », pointant l’absence d’éléments concrets prouvant la destruction totale des infrastructures iraniennes.
Une critique virulente des médias
Pete Hegseth, ancien animateur de Fox News, n’a pas mâché ses mots à l’égard de la presse. Il a accusé les journalistes de « chercher le scandale en permanence » et de refuser de saluer les « moments historiques » du mandat de Donald Trump. Interrogé sur l’existence d’un éventuel déplacement des stocks d’uranium avant les frappes, Hegseth a nié toute information en ce sens : « Je n’ai vu aucun renseignement indiquant que quelque chose ait été déplacé. »
Cependant, The Financial Times a publié jeudi un article basé sur des sources européennes affirmant que l’Iran avait, en effet, réparti ses 408 kg d’uranium enrichi à 60 % – proche du seuil de l’arme nucléaire – sur différents sites, en dehors de Fordow, avant l’attaque américaine. Une stratégie défensive anticipée par Téhéran, selon certains responsables européens.
Khamenei dément et affirme que les frappes n’ont « rien changé »
Dans ses premières déclarations publiques depuis le cessez-le-feu, le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a nié que les frappes américaines aient eu un impact significatif. « Le président américain a exagéré de manière inhabituelle. Les États-Unis n’ont rien gagné de cette guerre », a-t-il déclaré jeudi.
Selon lui, les installations nucléaires iraniennes restent fonctionnelles et le programme continue. L’Iran maintient que ses activités nucléaires sont exclusivement à visée civile, rejetant toute volonté de développer une arme.
Une guerre d’images et de récits
Alors que le président Trump se prépare à négocier – ou non – avec Téhéran dans les jours à venir, l’administration américaine semble vouloir contrôler strictement le récit autour de cette intervention militaire. Si les armes ont été larguées avec précision, la bataille pour imposer la perception d’un triomphe militaire fait rage. Et dans cette guerre des récits, la vérité semble encore enfouie, quelque part entre Fordow et les communiqués du Pentagone.