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Israël frappe Damas : Escalade éclair et tensions communautaires en Syrie

 Des frappes israéliennes ont touché mercredi le ministère syrien de la défense ainsi que le quartier général de l’armée syrienne.

Alors que la région espérait un répit, un nouveau front s’ouvre : Israël a frappé mercredi le ministère syrien de la Défense à Damas et visé des positions gouvernementales dans le sud du pays, en plein embrasement entre Druzes et tribus bédouines. Le risque d’engrenage régional est réel.

Selon les autorités israéliennes, les frappes répondent à la nécessité de protéger la minorité druze, dont certains membres sont liés historiquement à Israël. La colère a explosé après l’agression d’un adolescent druze sur la route de Damas. En représailles, des Druzes ont pris plusieurs Bédouins en otage, déclenchant de violents affrontements dans la région de Soueïda, près de la frontière israélienne.

Le nouveau régime syrien a dépêché des troupes pour « rétablir l’ordre », mais des soldats auraient tué des civils druzes et humilié d’autres en leur rasant la moustache — geste vécu comme une profonde offense. Israël affirme avoir frappé en riposte des positions syriennes, causant des pertes parmi militaires et civils.

Bilan humain : chiffres alarmants

D’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme, plus de 300 personnes ont été tuées depuis l’éruption des combats dimanche. Le décompte inclut 69 combattants druzes, 40 civils ainsi que 165 soldats syriens et 18 combattants bédouins.

La frappe israélienne visant l’état-major de l’armée et le ministère de la Défense à Damas aurait fait un mort et 18 blessés supplémentaires. Le bilan pourrait s’alourdir à mesure que l’information remonte des zones rurales.

Qui sont les Druzes ?

Des manifestants druzes ce mercredi à la frontière entre la Syrie et Israël

Les Druzes forment un groupe religieux et ethnoculturel arabe originaire des Hauteurs du Golan, du nord d’Israël et du sud de la Syrie, avec d’importantes communautés aussi au Liban. Leur foi est issue d’un courant ésotérique apparu dans l’orbite du chiisme mais les Druzes ne se définissent pas comme musulmans.

Historiquement, nombre de Druzes ont combattu aux côtés d’Israël lors de la guerre de 1948 et restent surreprésentés dans les rangs de Tsahal. Environ 145 000 Druzes vivent aujourd’hui en Israël et sur le Golan occupé, soit environ 1,6 % de la population israélienne. Cette proximité militaire et politique nourrit la sensibilité d’Israël à toute menace perçue contre les Druzes de Syrie.

Al-Sharaa : l’ex-rebelle devenu dirigeant… et cible

Le nouveau maître de Damas, Ahmed al-Sharaa — ancien combattant d’al-Qaïda passé costume-cravate — peine à stabiliser le pays depuis la chute du régime Assad en 2024. À l’époque, Israël avait profité du chaos pour détruire la majorité des capacités militaires syriennes (chars, missiles, convois).

Israël continue de voir al-Sharaa et ses forces comme des acteurs terroristes. Deux ministres israéliens ont même appelé récemment à « l’éliminer ». L’un d’eux, Amichai Chikli, a dénoncé un « régime islamiste-nazi d’al-Qaïda en costume et cravate », estimant qu’al-Sharaa « n’est pas un dirigeant légitime mais un meurtrier barbare ».

Le paradoxe : le président américain Donald Trump, sous l’influence de Riyad et d’Ankara, a choisi d’ouvrir la porte diplomatique à al-Sharaa, prenant Tel-Aviv de court.

Pourquoi Israël est-il inquiet ?

Plusieurs facteurs s’additionnent :

  • Héritage islamiste d’al-Sharaa, dans un contexte de menaces persistantes (Hamas, Hezbollah).
  • Son ancien nom de guerre, Abu Mohammad al-Julani : le suffixe « Julani » renvoie symboliquement aux Hauteurs du Golan, zone hautement sensible.
  • Crainte qu’un État syrien revitalisé, proche de la Turquie, de l’Arabie saoudite, des Émirats et du Qatar, ne devienne un contrepoids militaire et politique majeur.

Israël a d’ailleurs renforcé son contrôle d’une zone tampon sous mandat de l’ONU côté syrien et multiplie les frappes préventives.

 Et maintenant ?

Washington est furieux de voir Israël ouvrir ce nouveau front alors que les États-Unis fournissent l’essentiel du parapluie défensif israélien. L’administration Trump affirme vouloir « donner une chance » à la Syrie d’al-Sharaa. Mais le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a déjà prouvé sa capacité à manoeuvrer l’allié américain. Comme l’a dit un ancien conseiller à la sécurité nationale, Trump retient surtout « la voix de la dernière personne qui lui a parlé ».

Dans ce climat explosif, une étincelle supplémentaire pourrait embraser la frontière syro-israélienne. Vigilance maximale recommandée : la guerre suivante au Moyen-Orient semble déjà en marche.

Olivier ALLOCHEME  

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