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Politique migratoire américaine : Le Ghana accepte d’accueillir des Ouest-Africains expulsés des États-Unis

Le président ghanéen John Dramani Mahama a confirmé mercredi soir que son pays avait accepté, à la demande de Washington, d’accueillir des ressortissants ouest-africains expulsés des États-Unis. Quatorze personnes – dont des Nigérians et un Gambien – ont déjà été débarquées à Accra avant d’être renvoyées vers leurs pays d’origine.

Cette décision intervient dans un contexte marqué par la politique migratoire particulièrement stricte du président américain Donald Trump. L’administration républicaine a fait de l’expulsion massive d’immigrés en situation irrégulière une priorité et cherche à conclure des accords avec des pays africains pour accueillir des personnes expulsées, parfois sans lien direct avec ces territoires.

Libre circulation en Afrique de l’Ouest

Interrogé en conférence de presse, John Dramani Mahama a justifié l’accord en s’appuyant sur le principe de libre circulation au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).
« Les États-Unis nous ont approchés pour accepter des ressortissants de pays tiers expulsés de leur territoire, a-t-il déclaré. Nous avons estimé que les Ouest-Africains pouvaient être acceptés, car nos frères et sœurs de la région n’ont pas besoin de visa pour venir au Ghana. »

Le président ghanéen n’a toutefois pas précisé de plafond concernant le nombre de migrants que son pays pourrait accueillir dans ce cadre.

Des précédents sur le continent

Le Ghana n’est pas le seul pays africain sollicité. Ces derniers mois, les États-Unis ont multiplié les renvois vers des États dits « tiers ». En juillet, cinq personnes expulsées avaient été envoyées en Eswatini et huit autres au Soudan du Sud. En août, le Rwanda avait accepté d’accueillir sept migrants dans le cadre d’un accord pouvant concerner jusqu’à 250 personnes.

Si ces transferts sont présentés par Washington comme un moyen de lutter contre l’immigration illégale, ils suscitent de vives inquiétudes parmi les migrants eux-mêmes, qui craignent pour leur sécurité dans des pays qu’ils ne connaissent pas et où ils n’ont souvent aucune attache.

Relations tendues entre Accra et Washington

Cet accord survient alors que les relations entre Accra et Washington connaissent des frictions. Les États-Unis ont récemment augmenté les droits de douane sur certains produits ghanéens et restreint le nombre de visas accordés aux ressortissants du pays. John Mahama a reconnu que les relations bilatérales étaient « tendues » et a insisté sur la nécessité pour le Ghana de diversifier ses débouchés commerciaux, notamment vers la Chine.

Le Nigeria, principal partenaire régional du Ghana, a en revanche refusé de conclure un tel accord avec Washington. Sollicité en juin pour accueillir des ressortissants vénézuéliens expulsés, Abuja avait dénoncé « une pression considérable exercée sur les pays africains ».

Des tensions régionales

La décision du Ghana intervient également dans un climat de crispation interne. Ces derniers mois, des manifestations ont visé la communauté nigériane vivant sur son sol, accusée d’alimenter la criminalité et de concurrencer illégalement les commerçants locaux. En juillet, des rencontres bilatérales entre les autorités ghanéennes et nigérianes avaient été organisées pour apaiser la situation.

Une stratégie américaine assumée

Le 9 juillet dernier, Donald Trump avait accueilli à la Maison-Blanche cinq chefs d’État ouest-africains. Selon des sources diplomatiques, l’un des principaux objectifs de cette réunion était de convaincre ces dirigeants d’accepter davantage de migrants expulsés des États-Unis. John Mahama n’avait toutefois pas participé à cette rencontre.

En choisissant de coopérer avec Washington, le Ghana prend une position pragmatique mais délicate, entre la nécessité de préserver ses relations avec les États-Unis et le risque d’attiser les tensions sociales internes et régionales.

Olivier ALLOCHEME

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