Dans un contexte de cherté de la vie, la dernière décision de subventionner le prix des recharges de gaz domestique est aperçue comme un acte social en faveur des ménages les plus vulnérables. L’Ambassadeur Candide Ahouansou l’analyse dans une vision plus large du développement économique. Pour lui, au-delà de l’action, les importateurs de gaz doivent être intégrés à cette dynamique. Lire ci-dessous son analyse :

SUBVENTION DU PRIX A LA BOUTEILLE DU GAZ DOMESTIQUE
DU SOCIAL AU DEVELOPPEMENT
Il prime que nous jouissions d’une bonne santé pour profiter de la vie. Et la bonne santé passe principalement par la bonne cuisson des aliments ; aussi toute décision qui la favorise sur gaz butane et non plus sur charbon de bois nocif à bien d’égards pour notre santé, mérite-t-elle intérêt.
Récemment, les autorités ont réaménagé les contenants du gaz domestique et ont révisé à la baisse certains coûts de recharge pour les rendre plus accessibles aux plus défavorisés d’entre nous, ont-elles précisé. C’est sans aucun doute une mesure qui, prise intrinsèquement, mérite d’être saluée en raison de son impact social quand bien même modeste, du reste sur une frange déterminée de la population. Toutefois pour faire bonne mesure, il convient de l’apprécier également dans une approche intégrative et macroéconomique. Il sied alors de commencer par convenir de la place que tient la bouteille de gaz dans l’économie familiale et sociale.
LA BONBONNE DE GAZ BUTANE DANS L’ECHELLE DES BIENS DE CONSOMMATION
Nonobstant son volume et sans préjudice du charbon de bois, la bouteille de gaz butane fait, à n’en guère douter, partie intégrante des biens de consommation courante. C’est elle qui permet la cuisson des aliments que nous mangeons pour vivre, et elle est d’utilisation journalière, permanente et continuelle. Elle est donc en amont de toute notre vie alimentaire quelle que soit la catégorie sociale à laquelle nous appartenons ; et elle devrait être perçue comme telle dans toute prise de décision la concernant
UNE MESURE D’ORDRE SOCIAL A LA LISIERE DU DEVELOPPEMENT
Dans un article en date du 16 mars 2013 il y a donc 12 ans de cela, nous écrivions déjà qu’il fallait considérer l’accession au gaz butane comme un acquis de développement aux côtés des acquis sociaux qui s’expriment fondamentalement en termes monétaires et accessoirement en termes de bien-être social et des acquis politiques qui eux, se définissent en termes de libertés publiques et individuelles. L’accession au gaz butane est une avancée, un progrès de civilisation qu’il convient d’entretenir. Pour cette raison, nous nous étions inscrits en faux contre l’augmentation de son prix d’achat et avions proposé déjà une subvention dont les paramètres ne sont pas les mêmes que ceux que les autorités ont retenus.
La mesure qu’elles viennent de prendre porte révision des prix des recharges de butane et vise à alléger la charge de l’achat aux plus démunis d’entre nous ; et nous ne pensons pas nous tromper en l’inscrivant dans sa politique du ‘’hautement social »’. Il est à souhaiter néanmoins que par ricochet elle entraîne l’accroissement de la consommation de ce bien par les bénéficiaires de ladite mesure, car entretenir le social tout juste pour l’entretenir, c’est le maintenir à la traine sans jamais lui donner ses chances d’émerger. Le social est fondamentalement à la traîne du développement. Il stagne tandis que le développement se fait moteur de l’économie et se manifeste par des avancées et des progrès au fil du temps. Au reste, le gaz domestique a suivi cette évolution.
Ce fut une révolution historique que nos ancêtres, l’espèce homo erectus, aient découvert le feu en percutant deux pierres ; c’est une révolution moderne que nous passions du charbon de bois au gaz domestique pour cuire nos aliments dans nos foyers toutes catégories sociales confondues. Les autorités ont présenté la récente mesure comme étant une subvention dont les bénéficiaires sont les populations les plus défavorisées.
UNE SUBVENTION SE VEUT UNE MESURE INCITATIVE ET NON PAS UNE ASSISTANCE
Lorsqu’en toutes circonstances l’on prend une mesure spécifique en faveur des plus défavorisés comme cela est le cas pour le gaz domestique, ce n’est ni plus ni moins faire de l’assistance ; et l’assistance se réfère à une situation qui stagne et non pas qui se développe.
La subvention quant à elle, se veut incitative. Se référant à une entité ou à un produit de consommation courante, elle l’affecte dans son entièreté. Elle ne saurait être fractionnée de quelque manière notamment en tranches de population. Elle est d’essence uniforme et nationale pour un produit de consommation donné. La subvention perçue comme il convient ne peut alors viser à encourager une frange spécifique de la population à consommer un produit déterminé en laissant l’autre pour compte pour quelque raison que ce soit. Autrement elle tombe dans l’assistance à une catégorie de personnes. Il est vrai que politiquement parlant, le terme assistance ne sonne pas bien ; aussi le politique aura t- il tendance à lui préférer celui de subvention qui lui, a l’avantage de ne doigter ni de vexer le citoyen électeur, le cas échéant. Il ne fait aucun doute cependant que dans l’esprit des autorités qui ont pris la décision, la subvention tenait à la fois de l’assistance et de l’encouragement implicite à consommer davantage. Alors, comment harmoniser les deux préoccupations pour qu’elles concourent effectivement à l’accroissement de la consommation et partant, justifier techniquement la subvention ?
COMMENT CONCILIER ASSISTANCE ET SUBVENTION
Il s’agit de faire d’une pierre deux coups en amenant ceux à qui l’on apporte une assistante à accroître leur consommation par la même occasion. La solution se trouve certainement dans une sensibilisation accrue. C’est déjà par le biais d’une première vague de sensibilisation en direction des ménagères et des bûcherons que les moins fortunés d’entre nous en sont venus à l’utilisation du gaz domestique ayant ainsi donné congé au charbon de bois sans y renoncer complètement, il faut bien le reconnaître. Cette sensibilisation devra connaître une seconde vague, celle de la consolidation avec des thèmes judicieusement choisis et plus percutants en l’occurrence, pour continuer de dissuader le citoyen d’avoir recours quand bien même de manière sporadique, au charbon de bois sans oublier de tenir les bûcherons en respect. Alors, le terme subvention pourra se justifier dans toute son acception si ce n’est que pour raison supérieure de solidarité sociale, les moins démunis devront fermer les yeux sur le fait que les bouteilles de 12kgs en ont été d’office exclues. Les plus démunis devront, quant à eux, se faire à l’idée que pour l’instant, la subvention porte sur le contenu qu’est le gaz et n’inclut pas le contenant. Nous sommes confiants que les autorités se pencheront le moment venu sur cette question, car en définitive c’est le coût du contenant et non pas tant la recharge qui obèrent les finances des plus démunis et annihile leur volonté de se mettre, eux aussi, à l’heure du gaz domestique pour de bon. Et pourquoi ne pas mettre les importateurs du gaz à contribution dans cette démarche ainsi que nous l’avons proposé il y a 12 ans déjà ? Après tout c’est bien eux qui en vivent.
Ambassadeur Candide AHOUANSOU